Oued Znati- Plaidoyer pour les blés du terroir
Mardi, 10 avril 2007

Retirées purement et simplement du marché, et bradées sousd’autres cieux, les semences de blé dur de la région de Oued Zenati font défaut. Les doléances des agriculteurs pour la réintroduction de ces céréales sont inlassablement émises auprès de la Coopérative des céréales et des légumes secs (CCLS), de l’Institut technique de grandes cultures (ITGC), et autres organismes agricoles, eux-mêmes conscients que ces semences du terroir sont irremplaçables.

A signaler l’introduction sur le marché public au niveau des plaines intérieures du Nord algérien et de Guelma, en particulier, des blés durs en provenance de Syrie pour le Waha, de l’Espagne pour le Vitron, et du Mexique pour le GTA. Ces blé durs constituent pour l’heure les plus importantes quantités de semences vendues par la CCLS de Guelma durant les précédentes campagnes agricoles et celle de 2006 - 2007. L’unique semence issue du terroir de la région, Bidi 17, a été commercialisée cette année comme semence ordinaire à travers la wilaya de Guelma à hauteur de 2274,5q dont 267 pour la multiplication, soit moins de 1% de l’ensemble des semences commercialisées. Ces quintaux constituent vraisemblablement les derniers sacs d’une semence du terroir en voie de disparition, nous a-t-il été affirmé. Quant aux variétés Zenati 368, Zenati bouteille, le Hedba 03, selon certains responsables de la CCLS de Guelma, elles n’ont pas été distribuées à leur niveau depuis des lustres, malgré les doléances de plusieurs fellahs de la région de Guelma en faveur de leur vente.

Les arguments des services de l’ITGC

Les objectifs essentiels de l’Institut technique des grandes cultures de la wilaya de Guelma sont l’augmentation des rendements et l’amélioration de la production des grandes cultures, dont les céréales en qualité et quantité. Les semences acclimatées d’importation (Waha, Vitron, GTA), selon les services de l’ITGC, répondent parfaitement aux objectifs fixés, notamment leur rendement en paille et blé, ainsi que leur variable résistance aux maladies, telles la rouille (jaune, brune et noire), l’oïdium et la septoriose. Ces deux dernières maladies touchent actuellement la vallée de l’Oued Seybouse. Pour ce qui est des variétés du terroir de la région de Guelma, à savoir Zenati bouteille, Zenati 368 et Hedba 03, elles ont été retirées du marché et même à l’échelle expérimentale pour les deux premières, car leur rendement n’est pas en adéquation avec les programmes de développement agricole. EIles sont également sensibles aux maladies. Le plus étonnant dans cette histoire, c’est que des cadres de l’agriculture ont retrouvé ces mêmes blés du terroir dans plusieurs pays producteurs de blé dur, sous une forme génétiquement améliorée et sous autres appellations. Ils constituent pour l’heure des fleurons pour leur qualité à la mouture et transformation agroalimentaire, telles les pâtes. Donc, pourquoi ne pas réhabiliter nos blés du terroir ? Une question qui dérange visiblement !

Quelques kilos jalousement conservés

Aujourd’hui, seule une poignée de vieux agriculteurs conservent précieusement leur « âoualla de Zenati » dans la région de Guelma. En clair, du blé destiné exclusivement à la préparation de la « kesra » traditionnelle, tant pour sa qualité protéinique que pour sa richesse en gluten, lesquelles sont une référence dans leur région, contrairement à ce grain semé dans notre pays ; « un blé ni dur ni tendre », selon les mots d’une vieille femme à Aïn Leghrab, dans la région de Oued Zenati, et qui est en plus difficilement pétrissable. Il serait judicieux de réintroduire et de revaloriser nos semences locales car, elles seules, peuvent redorer le blason de notre agriculture outrageusement dépendante de tiers pays.

Face à la situation socioéconomique dramatique qui a engendré un irrémédiable déséquilibre sur le marché du travail, traduit par un taux de chômage qui ne cesse de ravager notre société, des milliers de jeunes s’orientent de plus en plus vers les formules d’emplois provisoires initiées pour atténuer un tant soit peu les effets de ce dangereux phénomène.
Une solution qui relève beaucoup plus du bricolage conjoncturel que d’une véritable politique visant la création et la garantie des emplois. Diplômés de l’université ou de la formation professionnelle, ils sont recrutés par la wilaya dans un cadre provisoire pour une durée de dix-huit mois et affectés dans les multiples institutions publiques pour s’occuper généralement des tâches secondaires. Une fois dans l’administration et contrairement à ce qui est prévu initialement, ils assurent des charges horaires égales à celles de titulaires pour des salaires ne dépassant pas les 6 000 DA, et perçus généralement avec plusieurs mois de retard. Hantés par le statut de chômeur et l’idée de se lever le matin sans aucune destination où désespérés par une longue quête de travail, ils préfèrent s’occuper histoire de se caser pour une période, ce qui permet de fuir l’oisiveté et le regard des autres. Mais devant la précarité des conditions de travail et la forme d’exploitation que revêtent ces postes, la déception ne tarde généralement pas à se manifester. Sans statut, ni garantie de la stabilité de ces emplois, ces nombreux jeunes universitaires ne savent plus quoi faire... Abandonner pour reprendre le statut de chômeur ou se sacrifier dans l’espoir d’être régularisé à la fin du contrat de pré-emploi comme promis souvent par l’administration. Le choix n’est pas toujours facile à faire devant l’ampleur du chômage qui écarte, chez la majorité, l’espoir de trouver un poste stable. Parmi ces jeunes diplômés Linda, recrutée par la DEJ dans le cadre de cette formule (pré-emploi) ou emploi de jeunes, est la parfaite illustration de cette frange déçue et désappointée et ce minimum qui n’offre déjà aucune stabilité sociale ou morale. Affectée dans un centre de formation professionnelle pour assurer des modules secondaires, elle se retrouve face à une situation inattendue. En plus des déplacements quotidiens qui lui reviennent à 200 DA/jour, donc qu’elle ne peut couvrir avec son salaire humiliant, faut-il le dire, la jeune Linda est contrainte d’assurer seule le poste d’enseignante avec une charge horaire égale à celle d’un PEP. Devant le manque d’enseignants notamment dans ce centre où elle assure ses cours, la jeune enseignante qui habite Guelma-ville se demande pourquoi ne pas lui octroyer un poste budgétaire, d’autant que son contrat prendra fin dans quelques semaines et que la section n’a pas encore d’enseignant ? Combien existe-t-il de postes vacants alors que leurs occupants souffrent de ce statut qui privilégie l’exploitation.

Karim Dadci
Source : El Watan

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