Rappelons-nous le Printemps Berbère 20 Avril 1980Batna : Célébration du 20 avril
Vendredi, 21 avril 2006

A l'occasion du Printemps Berbère, l’association de Thawmet a organisé une manifestation culturelle au Théâtre Régional de Batna (TRB). Au programme une conférence de Monsieur Saci Abdi et de la poésie.

Les poètes chawis ayant animé cette rencontre sont Djimi,Djimi Yemasse N Laurès (la mère des Aurès), Maache Azeddine, Tarek Merdaci, Zerfa Sahraoui et le doyen des poètes Abdelah Khelfa (Abrette N Webril : le message d'avril). Les poésies étaient en langue thacawith et traitaient de la question identitaire, de la langue et de ses racines, de tafssut imazighen (le printemps berbère) et de hamurth (le pays).

Le sujet de la conférence de Abdi « L’Aurès entre l’authenticité et son déracinement » a été présenté par le même conférencier le 10/02/1995 au même endroit, c'est à dire, le théâtre régional de Batna. La reprise du thème de la conférence souligne l’importance des exigences culturelles locales ainsi que le souci de la sauvegarde du riche patrimoine aurèssien qui caractérise l'identité chawie.

Selon Abdi, l’identité chawie amazigh est délaissée par ses enfants qui ignorent beaucoup de leur histoire. La maladresse des militants et, parfois, leur incapacité à valoriser la culture amazigh sont mises à l'index.

Saci AbdiL’intervenant s'est penché sur la géographie des Aurès (étendue linguistique) d’après les écrits de Duspois, puis sur le massif (150 X 90 kms) sillonné par les vallées Aith Abdi et Ighzar amellel.

Il est revenu par la suite sur l'histoire des Aurès en faisant référence à Hérodote, Pline, Strabon, Tacite et en passant par Ibn Khadoun qui accordait un intérêt particulier à la société Berbérophone Zenate. Abdi mis en exergue le potentiel humain riche et dense de ce territoire qui représentait la moitié sud de la Numidie. Il note également les méfaits des colonisateurs successifs (Romains, Vandales, Arabes, Turcs et Français) qui ont accentué l'acculturation de la population autochtones. La résistance n' a pu tenir qu'en rase campagne et dans les montagnes, et ce jusqu’à nos jours, sauvegardant ainsi le patrimoine Amazigh d’une manière miraculeuse et parfois mystérieuse...le combat de David contre Goliath. A ce propos le conférencier cite Salluste qui écrivait que l'Amazigh est né pour mourir en défendant les causes des autres!!!???

Le conférencier a rappelé l'accord signé par Messali (MNA) avec Chakib Arselane, syrien arabo-islamiste, à Genève en 1931 d'où son revirement vers l'arabo-islamisme, idéologie portée aussi par les Oulémas de Benbadis et les Wahhabistes visant l'effacement de l'identité berbère. Cette idéologie s'est concrétisée avec le projet adopté par le FLN de l'après indépendance (rappelons-nous la fameuse déclaration solennelle "nous sommes arabes" répétée trois fois par Ben Bella, Nassériste de surcroît). La résultante de cette "alliance politique", dévastatrice de la culture berbère, et de ses effets, précise Abdi, n'ont pas été achevée grâce à la résistance de l'élite francophone et de l'enracinement profond de la civilisation chawie et amazigh.

Abdi revient sur la France, et sa manipulation de la question berbère, qui identifiait les chawis comme étant arabes et encourageait l'émergence de l'identité kabyle en Kabylie bien qu'elle savait pertinemment que Chawis et Kabyles sont Berbères (les études d'ethnologues, d'anthropologues et mêmes militaires le prouve). Cette même France coloniale, toujours, privilégiait certains féodaux chawis et dans des cas des groupes ethniques arabo-arabphones locaux ou extra-communautaires en les désignant institutionnellement comme arabes. Sans oublier au passage de rappeler son rôle [la France] dans l'étouffement et l'écrasement du projet nord-africain de Abdelkrim Khatabi.

L’Aurès d’aujourd’hui, selon Abdi, contraint par un système cherchant à lui imposer des références culturelles et civilisationnelles qui ne sont pas les siens usant de l'école et des médias pour y parvenir, est pris en otage culturellement : oscille entre l'occident et l'orient, entre l'irrationnel et le rationnel, entre l'aliénation et l'affranchissement, entre l'archaïsme et la modernité, entre la bassesse et la dignité.

Selon le conférencier, seule une vision et un projet rational et scientifique pourront le libérer de l'hégémonie qui perdurent depuis des siècles et conquérir sa souveraineté.

Un débat riche a été entamé après cette conférence clarifiant les avis et permettant des échanges probants et transparents.


Correspondance de Batna